Aide belge au développement, rapport 2016
L’aide belge est la principale variable d’ajustement budgétaire du gouvernement et la Belgique est devenue le premier pays destinataire de sa propre aide : tels sont les principaux enseignements du Rapport annuel 2016 sur l’aide belge au développement.
Le Rapport 2016 sur l’aide belge du Centre national de Coopération au Développement (CNCD-11.11.11) dresse un état de la politique belge de coopération au développement. Après un bref aperçu de l’évolution du contexte international, le Rapport analyse les évolutions en termes de quantité et de qualité de l’aide belge, ainsi qu’en matière de cohérence des politiques belges en faveur du développement. Enfin, il consacre son « zoom » sur le bilan de l’efficacité de plus d’un demi-siècle d’aide au développement et conclut sur les perspectives permettant d’adapter celle-ci aux enjeux mondiaux du 21e siècle.
Le contexte international est marqué par une stagnation de l’aide mondiale autour de 0,3% du revenu national brut (RNB) des pays donateurs. Les besoins sont pourtant grandissants, alors que l’ONU a adopté en septembre 2015 les Objectifs de développement durable, qui représentent le nouvel agenda international du développement. Par ailleurs, les changements climatiques ont occupé une place particulière en décembre 2015, avec l’organisation de la COP21, qui a débouché sur l’Accord de Paris. Cet accord, insuffisant à résoudre le problème climatique, représente cependant un pas important dans la bonne direction. Enfin, l’année 2015 a été marquée par l’augmentation importante du nombre de demandeurs d’asile en Europe, suite à l’exacerbation des conflits dans son voisinage et à la vague de réfugiés qu’ils ont engendrée.
La quantité de l’aide belge au développement a baissé de 123 millions EUR entre 2014 et 2015, pour atteindre 1,723 milliard EUR, soit une baisse de 0,46% à 0,42% du RNB. L’aide belge ne cesse de diminuer depuis 2010. La tendance s’est renforcée sous le gouvernement actuel, qui a planifié des coupes budgétaires jusqu’en 2019, auxquelles s’ajoutent les nouvelles réductions opérées lors des conclaves budgétaires, faisant de l’aide au développement la principale variable d’ajustement budgétaire du gouvernement. Toutefois, la Coopération belge a le mérite de se concentrer dans les pays pauvres et les États fragiles. Un choix qui s’accompagne d’une politique de sélectivité démocratique cohérente, mais qui pourrait entraîner une baisse encore plus importante de l’aide belge, en particulier dans les Grands Lacs où le Burundi a déjà vu son aide suspendue en 2015 suite au non-respect de la Constitution. Enfin, le fait marquant de l’aide belge en 2015 est que le premier bénéficiaire en est désormais la Belgique. En cause, la comptabilisation des frais d’accueil des demandeurs d’asile, qui représentent 12% de l’aide en 2015, alors que ces montants ne sont pas dépensés dans les pays partenaires, mais en Belgique.
Au niveau de la qualité de l’aide, le ministre de la Coopération a entamé une réforme des différents canaux de la Coopération belge. Il a ainsi proposé de transformer l’actuelle Coopération technique belge (CTB) en une Agence belge de développement (BDA pour Belgian Development Agency). Cette réforme vise trois objectifs politiques principaux : intégrer les différents départements fédéraux dans une approche commune, sélectionner l’acteur le plus adéquat pour la mise en œuvre des différents programmes et décentraliser les processus de décision dans les pays partenaires. La réforme proposée maintient toutefois la structure tricéphale incluant l’administration (DGD), la société d’investissement dans le secteur privé des pays en développement (BIO) et la nouvelle Agence belge de développement (BDA). La réforme de la Coopération belge concerne par ailleurs la coopération non-gouvernementale, visant à réduire la charge administrative de la DGD, à renforcer la concentration géographique des interventions et à favoriser les synergies entre acteurs. Les ONG et les autres acteurs vont ainsi concentrer 90% de leurs interventions dans 30 pays sur base de Cadres stratégiques communs (CSC) permettant d’identifier des cibles stratégiques communes et des synergies opérationnelles.
En matière de cohérence des politiques en faveur du développement (CPD), le dispositif institutionnel instauré par le précédent gouvernement est désormais en état de marche. L’analyse d’impact de la réglementation (AIR) a été trop rarement utilisée jusqu’ici. La Commission interdépartementale a été nommée en 2015 et a organisé ses deux premières rencontres, mais le manque de ressources humaines à sa disposition, ainsi que l’absence d’une Conférence interministérielle garantissant l’impulsion politique nécessaire, ont rendu son travail difficile. Quant au Conseil consultatif de la société civile, il a remis sept avis au ministre depuis sa création. Au-delà de ces considérations institutionnelles, plusieurs décisions belges ou européennes récentes se sont révélées incohérentes, notamment les mécanismes d’évasion fiscale favorisés par la Belgique et la négociation par l’Union européenne d’accords peu favorables au développement avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). D’autres décisions ont au contraire renforcé la cohérence des politiques belges en faveur du développement, comme la loi belge sur les fonds vautours ou la récente collaboration entre le SPF sécurité sociale et la Coopération technique belge pour mettre en œuvre des projets en faveur de la protection sociale dans les pays en développement.
Enfin, le zoom de ce Rapport 2016 s’attarde sur les débats concernant l’aide au développement. Depuis quelques années, celle-ci fait face à une remise en cause de son efficacité, voire de sa pertinence. Pourtant, les études sur l’impact à long terme de l’aide attestent de ses résultats. Si elle n’est pas la panacée, l’aide présente un bilan globalement positif, à condition toutefois que son impact ne soit pas contrecarré par d’autres politiques contre-productives et qu’elle soit allouée en quantité suffisante. L’aide au développement doit certes être réformée, mais son existence semble plus nécessaire que jamais pour contribuer à apporter les réponses adéquates aux enjeux mondiaux du 21e siècle.